Si tout se déroule comme prévu, 80 ans se seront écoulés depuis la libération du camp d’Auschwitz lorsque la nouvelle version du musée sera inaugurée, et force est de constater que le souvenir de cette période sombre commence à s’étioler.
« Certains (visiteurs) ne connaissent pas cette tragique partie de l’histoire, ce qui justifie encore plus la nécessité d’un musée à la fois pour les accueillir et pour pouvoir les sensibiliser à cette réalité », a dit le directeur du musée, Daniel Amar.
Le nouveau musée sera situé à la jonction du corridor muséal et du quartier des spectacles, sur un terrain de 20 000 pieds carrés.
Il sera notamment doté de plus grands espaces d’exposition permanente et temporaire, d’un espace jeunesse, d’une salle consacrée aux témoignages interactifs par hologramme, de salles de classe à la fine pointe de la technologie, d’un auditorium de 150 places, d’un espace commémoratif et d’un jardin mémoriel.
« Le nombre de survivants s’amenuise malheureusement, et dans quelques années très peu pourront témoigner, a dit M. Amar au sujet du recours aux hologrammes. Et à travers cette technologie, on sera en mesure de conserver leur mémoire à perpétuité, de permettre à des jeunes de pouvoir les questionner, même s’ils ne sont plus là, et d’avoir des réponses. »
La technologie est par ailleurs incontournable si on veut réussir à retenir l’attention des groupes scolaires que le nouveau musée sera dorénavant en mesure d’accueillir, a-t-il ajouté. C’est pourquoi quelque 3 millions seront consacrés à ce seul aspect.
Déjà très présent en ligne, le musée « doit encore enrichir cette offre pour faire en sorte que l’on soit capable d’aller capter l’intérêt de cette nouvelle clientèle », a souligné M. Amar.
Des études menées aux États-Unis démontreraient que les jeunes qui visitent des musées consacrés à l’Holocauste développent « tout de suite une forme d’empathie, de compréhension, de sensibilité par rapport non seulement à la Shoah, mais à toutes les autres formes de discrimination », a dit Jacques Saada, qui est membre du conseil d’administration du Musée de l’Holocauste Montréal.
« L’effet est positif et il est immédiat », a-t-il assuré.
Emplacement symbolique
Le Musée de l’Holocauste Montréal compte quelque 13 500 objets dans sa collection, mais l’espace dont il dispose présentement ne lui permet que d’en présenter une infime fraction, soit 350.
Des expositions temporaires seront aussi possibles, ce qui n’est pas le cas en ce moment, faute d’espace.
Son installation sur la boulevard Saint-Laurent est riche en symbolisme. Autrefois le foyer d’accueil de la communauté juive de Montréal, l’artère est aussi souvent perçue comme la démarcation entre l’Est francophone et l’Ouest anglophone de la métropole.
« Il est évident que le fait d’être, disons, à la frontière entre le Montréal francophone et le Montréal anglophone ne faisait que nous conforter dans notre volonté d’être un trait d’union entre les communautés linguistiques et les communautés ethniques, les communautés culturelles », a dit M. Amar.
« C’est notre ambition d’être à la fois un musée thématique, mais aussi un musée communautaire, un lieu d’échange et de rassemblement pour toutes les communautés et surtout pour toutes les communautés victimes de génocide. On veut que, symboliquement, elles le perçoivent comme leur musée également. »
En gestation depuis 2017, le projet de 80 millions est rendu possible notamment grâce aux contributions du ministère de la Culture et des Communications du Québec à hauteur de 20 millions, de la Fondation Azrieli à hauteur de 15 millions et de multiples contributeurs privés.
La firme d’architectes retenue pour le design du nouveau musée sera dévoilée en juillet 2022, au terme d’un concours international d’architecture lancé à l’automne 2021 et auquel ont répondu une quarantaine de firmes.
On estime que quelque 35 000 survivants de l’Holocauste ont refait leur vie au Canada, dont 9000 qui se sont installés à Montréal.
Publié à l’origine dans La Presse. Voir l’article ici.