Pendant des siècles, la manière d’assister à un opéra ou un ballet n’a pratiquement pas changé : on se rendait dans une salle, on y admirait la danse et les chants des artistes, puis on rentrait chez soi.
Même lors des dernières années, en dépit de l’évolution rapide de la technologie numérique, si une performance était enregistrée à des fins de diffusion, la cinématographie était nettement moins dynamique ou captivante que ce qui nous était donné de voir dans la majorité des émissions télévisées ou des films.
La Compagnie d’opéra canadienne et le Ballet national du Canada, qui partagent le Four Seasons Performing Arts Centre de Toronto, avaient déjà commencé à collaborer afin de transformer cette expérience, en explorant des manières innovantes d’interagir avec le public, lorsque la COVID-19 a soudainement interrompu toutes les performances devant public.
Crédit : Artistes du Ballet lors du tournage d’extraits de La Belle au bois dormant. Photo de Karolina Kuras.
Grâce au soutien de la Fondation Azrieli et d’autres bailleurs de fonds, ces deux compagnies sont parvenues à intensifier leur collaboration numérique « Digital Stage », en investissant envers une foule de nouvelles technologies, y compris des caméras robotisées 4K de pointe et des serveurs de plus de 100 téraoctets, afin d’expérimenter la diffusion en flux continu de contenu à travers le globe. Au lieu de garder pour eux-mêmes ces innovations, elles partagent les fruits de leurs expériences avec de plus modestes organisations artistiques qui sont elles aussi confrontées au besoin de s’adapter.
« Ce qui, au départ, relevait plutôt d’une réflexion sur nos aspirations futures s’est soudain imposé comme une mission d’urgence critique », explique Alex Hocevar, le consultant d’affaires en transformations numériques qui a été mandaté par la Compagnie d’opéra canadienne pour diriger le projet et s’assurer de la pérennité de la technologie choisie. « Il n’y a presque aucune incidence pour le public dans la salle, et les gens qui n’auraient peut-être pas la possibilité d’aller à l’opéra ou au ballet peuvent maintenant voir ces performances. »
Pour Barry Hughson, directeur exécutif du Ballet national, trouver de nouveaux moyens de produire de l’art pendant — et après — la pandémie fait également partie d’un processus de guérison sociétal. Il repense à un cours de mouvement créatif proposé par des danseurs de ballet à l’intention du personnel de première ligne, ce qui n’aurait pas été possible sans le partenariat « Digital Stage ».
« Ces gens-là sauvaient des vies », dit-il au sujet des hommes et des femmes qui étaient au bout du rouleau et avaient un urgent besoin de reprendre des forces. « Nous leur avons offert une courte pause, le temps de renouer avec leur corps et leur créativité. C’est ça, le pouvoir des arts. »
